George Sand

Aldo le rimeur
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SCÈNE IV.


ALDO, _seul_.

Elle a raison, cette femme! elle a raison devant Dieu et devant les
hommes! Moi, je n'ai raison que devant ma conscience. Je ne puis avoir
d'autre juge que moi-même, et ne puis me plaindre qu'à moi-même.--Car,
enfin, il ne dépend pas de moi d'être autrement. Tout m'accuse
d'affectation; mais on n'est pas affecté, on n'est pas menteur avec
soi-même. Je sais bien, moi, que je suis ce que je suis. Les autres sont
autres, et ne me comprenant pas, ils me nient; ils sont injustes, car
moi je ne nie pas leur sincérité; ils me disent qu'ils sont courageux,
je pourrais leur répondre qu'ils sont insensibles. Mais j'accepte ce
qu'ils me disent, je consens à les reconnaître courageux. Mais s'ils le
sont, pourquoi me reprochent-ils impitoyablement de ne l'être pas? Si
j'étais Hercule, au lieu de mépriser et de railler les faibles enfants
que je trouverais haletants et pleurants sur la route, je les prendrais
sur mes épaules, je les porterais, une partie du chemin, dans ma peau de
lion. Que serait pour moi ce léger fardeau, si j'étais Hercule?--Voua
ne l'êtes pas, vous qui vous indignez de la faiblesse d'autrui. Elle ne
vous révolte pas, elle vous effraie. Vous craignez d'être forcés de la
secourir, et, comme vous ne le pouvez pas, vous l'humiliez pour lui
apprendre à se passer de vous.

Eh bien, oui, je suis faible: faible de coeur, faible de corps, faible
d'esprit. Quand j'aime, je ne vis plus en moi; je préfère ce que j'aime
à moi-même.--Quand je veux suivre la chasse, j'en suis vite dégoûté,
parce que je suis vite fatigué.--Quand on me raille, ou me blâme, je
suis effrayé, parce que je crains de perdre les affections dont je ne
puis me passer, parce que je sens que je suis méconnu, et que j'ai
trop de candeur pour me réhabiliter en me vantant. Avec les hommes,
il faudrait être insolent et menteur. Je ne puis pas. Je connais mes
faiblesses et n'en rougis pas, car je connais aussi les faiblesses des
autres et n'en suis pas révolté. Je les supporte tels qu'ils sont. Je ne
repousse pas les plus méprisables, je les plains, et, tout faible que
je suis, j'essaie de soutenir et de relever ceux qui sont plus faibles
encore. Pourquoi ceux qui se disent forts ne me rendent-ils pas la
pareille?

--Dieu! je ne t'invoque pas! car tu es sourd. Je ne te nie pas;
peut-être te manifesteras-tu à moi dans une autre vie. J'espère en la
mort.

Mais ici tu ne te révèles pas. Tu nous laisses souffrir et crier en
vain. Tu ne prends pas le parti de l'opprimé, tu ne punis pas le
méchant. J'accepte tout, mon Dieu! et je dis que c'est bien, puisque
c'est ainsi. Suis-je impie, dis-moi?

Mais je t'interroge, toi, mon coeur; toi, divine partie de moi-même.
Conscience, voix du ciel cachée en moi, comme le son mélodieux dans les
entrailles de la harpe, je te prends à témoin, je te somme de me rendre
justice. Ai-je été lâche? ai-je lutté contre le malheur? ai-je supporté
la misère, la faim, le froid? ai-je abandonné ma mère lorsque tout
m'abandonnait, même la force du corps? ai-je résisté à l'épuisement et à
la maladie? ai-je résisté à la tentation de me tuer?--Où est le mendiant
que j'aie repoussé? où est le malheureux que j'aie refusé de secourir?
où est l'humilié que je n'aie pas exhorté à la résignation, rappelé à
l'espérance? J'ai été nu et affamé. J'ai partagé mon dernier vêtement
avec ma mère aveugle et sourde, mon dernier morceau de pain avec mon
chien efflanqué. J'ai toujours pris en sus de ma part de souffrances
une part des souffrances d'autrui; et ils disent que je suis lâche, ils
rient de la sensibilité niaise du poëte! et ils ont raison, car ils sont
tous d'accord, ils sont tous semblables. Ils sont forts les uns par les
autres.

Je suis seul, moi! et j'ai vécu seul jusqu'ici. Suis-je lâche? J'ai eu
besoin d'amitié, et, ne l'ayant point trouvée, j'ai su me passer d'elle.
J'ai eu besoin d'amour, et, n'en pouvant inspirer beaucoup, voilà que
j'accepte le peu qu'on m'accorde. Je me soumets, et l'on me raille. Je
pleure tout bas, et l'on me méprise.

C'est donc une lâcheté que de souffrir? C'est comme si vous m'accusiez
d'être lâche parce qu'il y a du sang dans mes veines et qu'il coule à la
moindre blessure. C'est une lâcheté aussi que de mourir quand on vous
tue! Mais que m'importait cela? N'avais-je pas bien pris mon parti sur
les railleries de mes compagnons? N'avais-je pas consenti à montrer mon
front pâle au milieu de leurs fêtes et à passer pour le dernier des
buveurs? N'avais-je pas livré mes vers au public, sachant bien que deux
ou trois sympathiseraient avec moi, sur deux ou trois mille qui me
traiteraient de rêveur et de fou? Après avoir souffert du métier de
poëte en lutte avec la misère et l'obscurité, j'avais souffert plus
encore du métier de poëte aux prises avec la célébrité et les envieux!
Et pourtant j'avais pris mon parti encore une fois. Ne trouvant pas le
bonheur dans la richesse et dans ce qu'on appelle la gloire, je
m'étais réfugié dans le coeur d'une femme, et j'espérais. Celle-là, me
disais-je, est venue me prendre par la main au bord du fleuve où je
voulais mourir. Elle m'a enlevé sur sa banque magique, elle m'a conduit
dans un monde de prestiges qui m'a ébloui et trompé, mais où, du moins,
elle m'a révélé quelque chose de vrai et de beau, son propre coeur. Si
les vains fantômes de mon rêve se sont vite évanouis, c'est qu'elle
était une fée, et que sa baguette savait évoquer des mensonges et des
merveilles, mais elle est une divinité bienfaisante, cette fée qui me
promène sur son char. Elle m'a leurré de cent illusions pour m'éprouver
ou pour m'éclairer. Au bout du voyage, je trouverai derrière son nuage
de feu, la vérité, beauté nue et sublime que j'ai cherchée, que j'ai
adorée à travers tous les mensonges de la vie, et dont le rayon
éclairait ma route au milieu des écueils où les autres brisent le
cristal pur de leur vertu. Fantômes qui nous égarez, ombres célestes que
nous poursuivons toujours dans la nue, et qui nous faites courir après
vous sans regarder où nous mettons les pieds, pourquoi revêtez-vous des
formes sensibles, pourquoi vous déguisez-vous en femmes? Appelez-vous la
vérité, appelez-vous la beauté, appelez-vous la poésie; ne vous appelez
pas Jane, Agandecca, l'amour.

Tu te plains, malheureux! Et qu'as-tu fait pour être mieux traité que
les autres? Pourquoi cette insolente ambition d'être heureux? Pourquoi
n'es-tu pas fier de ton laurier de poëte et de l'amour d'une reine? Et
si cela ne te suffit pas, pourquoi ne cherches-tu pas dans la réalité
d'autres biens que tu puisses atteindre? Suffolk était aimé de la reine;
il voulait plus que partager sa couche, il voulait partager son trône.
Athol fut aimé de la reine; il s'ennuyait souvent près d'elle, il
désirait la gloire des combats, et le laurier teint de sang, qui lui
semblait préférable à tout. Suffolk, Athol, vous étiez des ambitieux,
mais vous n'étiez pas des fous; vous désiriez ce que vous pouviez
espérer; la puissance, la victoire, l'argent, l'honneur, tout cela est
dans la vie; l'homme tenace, l'homme brave doivent y atteindre, La reine
a chassé Suffolk; mais il règne sur une province, et il est content.
Athol a été disgracié; mais il commande une armée, et il est fier.

Moi, que puis-je aimer après elle? rien. Où est le but de mes
insatiables désirs? dans mon coeur, au ciel, nulle part peut-être?
Qu'est-ce que je veux? un coeur semblable au mien, qui me réponde; ce
coeur n'existe pas. On me le promet, on m'en fait voir l'ombre, on me
le vante, et quand je le cherche, je ne le trouve pas. On s'amuse de ma
passion comme d'une chose singulière, on la regarde comme un spectacle,
et quelquefois l'on s'attendrit et l'on bat des mains; mais le plus
souvent on la trouve fausse, monotone et de mauvais goût. On m'admire,
on me recherche et on m'écoute, parce que je suis un poëte; mais quand
j'ai dit mes vers, on me défend d'éprouver ce que j'ai raconté, on me
raille d'espérer ce que j'ai conçu et rêvé. Taisez-vous, me dit-on, et
gardez vos églogues pour les réciter devant le monde; soyez homme avec
les hommes, hissez donc le poëte sur le bord du lac où vous le promenez,
au fond du cabinet où vous travaillez.--Mais le poëte, c'est moi! Le
coeur brûlant qui se répand en vers brûlants, je ne puis l'arracher de
mes entrailles. Je ne puis étouffer dans mon sein l'ange mélodieux qui
chante et qui souffre. Quand vous l'écoutez chanter, vous pleurez; puis
vous essuyez vos larmes, et tout est dit. Il faut que mon rôle cesse
avec votre émotion: aussitôt que vous cessez d'être attentifs, il faut
que je cesse d'être inspiré. Qu'est-ce donc que la poésie? Croyez-vous
que ce soit seulement l'art d'assembler des mots?

Vous avez tous raison. Et vous surtout, femme, vous avez raison! vous
êtes reine, vous êtes belle, vous êtes ambitieuse et forte. Votre âme
est grande, votre esprit est vaste. Vous avez une belle vie; en bien!
vivez. Changez d'amusement, changez de caractère vingt fois par jour;
vous le devez, si vous le pouvez! je ne vous blâme pas; et, si je vous
aime, c'est peut-être parce que je vous sens plus forte et plus sage
que moi. Si je suis heureux d'un de vos sourires, si une de vos larmes
m'enivre de joie, c'est que vos larmes et vos sourires sont des
bienfaits, c'est que vous m'accordez ce que vous pourriez me refuser.
Moi, quel mérite ai-je à vous aimer? je ne puis faire autrement. De quel
prix est mon amour? l'amour est ma seule faculté. A quels plaisirs, à
quels enivrements ai-je la gloire de tout préférer? Rien ne m'enivre,
rien ne me plaît, si ce n'est vous. La moindre de vos caresses est un
sacrifice que vous me faites, puisque c'est un instant que vous dérobez
à d'autres intérêts de votre vie. Moi, je ne vous sacrifie rien. Vous
êtes mon autel et mon Dieu, et je suis moi-même l'offrande déposée à vos
pieds.

Si je suis mécontent, j'ai donc tort! A qui puis-je m'en prendre de mes
souffrances? Si je pouvais me plaindre, m'indigner, exiger plus qu'on ne
me donne, j'espérerais. Mais je n'espère ni ne réclame; je souffre.

Eh bien, oui, je souffre et je sais mécontent. Pourquoi ai-je voulu
vivre? Quelle insigne lâcheté m'a poussé à tenter encore l'impossible?
Ne savais-je pas bien que j'étais seul de mon espèce et que je serais
toujours ridicule et importun? Qu'y a-t-il de plus chétif et de plus
misérable que l'homme qui se plaint? Oui, l'homme qui souffre est un
fléau! c'est un objet de tristesse et de dégoût pour les autres! c'est
un cadavre qui encombre la voie publique, et dont les passants se
détournent avec effroi. Etre malheureux, c'est être l'ennemi du genre
humain, car tous les hommes veulent vivre pour leur compte, et celui
qui ne sait pas vivre pour lui-même est un voleur qui dépouille ou un
mendiant qui assiège.

Meurs donc, lâche! il est bien temps d'en finir! tu t'es bien assez
cabré sous la nécessité! Tes flancs ont saigné, et tu n'as pas fait un
pas en avant! Résigne-toi donc à mourir sans avoir été heureux!...

Hélas! hélas! mourir, c'est horrible!... Si c'était seulement saigner,
défaillir, tomber!... mais ce n'est pas cela. Si c'était porter sa tête
sous une hache, souffrir la torture, descendre vivant dans le froid
du tombeau! mais c'est bien pis: c'est renoncer à l'espérance, c'est
renoncer à l'amour; c'est prononcer l'arrêt du néant sur tous ces rêves
enivrants qui nous ont leurrés, c'est renoncer à ces rares instants de
volupté qui faisaient pressentir le bonheur, et qui l'étaient peut-être!

Au fait, un jour, une heure dans la vie, n'est-ce pas assez, n'est-ce
pas trop! Agandecca, vous m'avez dit des mots qui valaient une année de
gloire, vous m'avez causé des transports qui valaient mieux qu'un siècle
de repos. Ce soir, demain, vous me donnerez un baiser qui effacera
toutes les tortures de ma vie, et qui fera de moi un instant le roi de
la terre et du ciel!

Mais pourquoi retomber toujours dans l'abîme de douleur? pourquoi
chercher ces joies si elles doivent finir et si je ne sais pas y
renoncer? Les autres se lassent et se fatiguent de leurs jouissances:
moi, la jouissance m'échappe et le désir ne meurt pas! O amour! éternel
tourment!... soif inextinguible!

Si je quittais la reine?... Mais je ne le pourrai pas; et, si je le
puis, j'aimerai une autre femme qui me rendra plus malheureux. Je ne
saurai pas vivre sans aimer. L'amour ou l'amitié ne me paieront pas ce
que je dépenserai de mon coeur pour les alimenter!... Comment ai-je pu
vivre jusqu'ici? Je ne le conçois pas. Suis-je le plus courageux ou
le plus lâche de tous les hommes?--Je ne sais pas; et comment le
savoir?--Celui qui souffre pour donner du bonheur aux autres... oui,
celui-là est brave... mais celui qui souffre et qui importune, celui qui
veut du bonheur et qui n'en sait pas donner!... Oh! décidément je suis
un lâche! comment ne m'en suis-je pas convaincu plus tôt? (_Il tire son
épée_). Lune... brise du soir!... Tais-toi, poëte, tu n'es qu'un sot.
Qu'est-ce qui mérite un adieu de toi? qu'est-ce qui t'accordera un
regret? (_Il va pour se tuer._)



SCÈNE V.


LE DOCTEUR ACROCERONIUS, _entrant_.

Que faites-vous, seigneur Aldo, dans cette attitude singulière?


ALDO.

Vous le voyez, mon cher ami, je me tue.


ACROCERONIUS.

En ce cas, je vous salue, et je vous prie de ne pas déranger pour moi.
Puis-je vous rendre quelque service après votre mort?


ALDO.

Je ne laisserai personne pour s'en apercevoir.


ACROCERONIUS

Je suis fâché que vous preniez cette résolution avant le coucher de la
lune.


ALDO.

Pourquoi?


ACROCERONIUS.

Parce que la nuit est fort belle, et que vous perdrez une des plus
belles éclipses de lune que nous ayons eues depuis longtemps.


ALDO.

Il y a une éclipse de lune?


ACROCERONIUS.

Totale. Il n'y a pas un nuage dans le ciel, et elle sera tellement
visible, que je m'étonne de rencontrer un homme aussi indifférent que
vous à cet important phénomène.


ALDO.

En quoi cela peut-il m'intéresser?


ACROCERONIUS.

Venez avec moi sur la montagne de Lego, et je vous le ferai comprendre.


ALDO.

Je vous remercie beaucoup. Je ne me sens pas disposé à marcher, et
j'aime mieux me passer mon épée au travers du corps.


ACROCERONIUS.

Faites ce qui vous convient, et ne vous gênez pas devant moi. Cependant
j'aurais été flatté d'avoir votre compagnie durant ma promenade.


ALDO.

En quoi pourrais-je vous être utile! La solitude convient mieux à vos
savantes élucubrations. Je ne suis qu'un pauvre poëte, peu capable de
raisonner avec vous sur d'aussi graves matières.


ACROCERONIUS.

La société des poëtes m'a toujours été fort agréable. Les poëtes sont de
très-intelligents observateurs de la nature. Ils sont faibles sur les
classifications, mais ils ont beaucoup de netteté dans l'observation.
Ils possèdent l'appréciation juste de la couleur et de la forme, et
quelquefois ils remarquent des rapports qui nous échappent; des nuances
presque insaisissables leur sont révélées par je ne sais quel sens qui
nous manque. Je suis sûr que vous me feriez voir des choses dont je sais
l'existence, et que pourtant je n'ai jamais pu observer à l'oeil nu.


ALDO.

Les savants sont poëtes aussi, n'en doutez pas; ils n'ont pas besoin,
comme nous, d'observer pour voir. Ils savent tant de choses, qu'ils
peuvent peindre la nature sans la regarder, comme on fait de mémoire le
portrait de sa maîtresse. Ils peuvent nous initier à plus d'un mystère
dont l'art fait son profit. L'art n'est qu'un riche vêtement qui couvre
les beautés nues sous l'oeil de la science. Je suis fâché, mon cher
maître, d'avoir vécu longtemps sous le même toit que vous, sans avoir
songé à profiter de votre entretien.


ACROCERONIUS.

Si vous n'êtes pas forcé absolument de vous tuer ce soir, vous pourriez
venir avec moi sur la montagne de Lego. Nous observerions l'éclipse de
lune, nous causerions sur toutes les choses connues; vous pourriez être
revenu et mort avant le lever de la reine.


ALDO.

Vous avez raison. Donnez-moi votre télescope et faisons cette promenade
ensemble. Vous m'apprendrez beaucoup de choses que j'ignore. Je vous
interrogerai sur les amours des plantes, sur le sommeil des feuilles,
sur l'écume que la lune répand à minuit dans les herbes, sur les bruits
qu'on entend la nuit... Avez-vous remarqué cette grande voix aigre qui
crie incessamment autour de l'horizon, et qui est si égale, si continue,
si monotone, qu'on la prend souvent pour le silence?


ACROCERONIUS.

J'ai écrit précisément un petit traité in-4° sur ce dont vous parlez;
mais, pour bien vous le faire comprendre, il faudrait sortir un peu du
monde visible, et nous aventurer dans des questions d'astrologie pour
lesquelles vous auriez peut-être quelque répugnance.


ALDO.

L'astrologie! oh! tout au contraire, mon cher maître. Je serais
très-curieux d'avoir quelque notion sur cette science étonnante. J'y ai
songé quelquefois, et si les préoccupations de mon esprit m'en avaient
laissé le temps, j'aurais pris plaisir à soulever un coin du voile qui
me cache cette mystérieuse Isis. Qui sait si la faiblesse de l'homme ne
peut trouver dans ces profondeurs ignorées le secret du bonheur qu'elle
cherche en vain ici-bas? On est bientôt las et dégoûté d'analyser et
d'interroger les choses qui existent matériellement. Le monde invisible
n'est pas épuisé... et si je pouvais m'y élancer...


ACROCERONIUS.

Venez avec moi, mon cher fils, et nous tâcherons de bien observer la
lune.


ALDO, _remettant son épée dans le fourreau_

Allons-nous bien loin sur la montagne?


ACROCERONIUS.

Aussi loin que nous pourrons aller. Vous me parliez de l'écume que
répand la lune, voyez-vous, mon cher fils, le règne végétal d'après
toutes les classific.... (_ils sortent en causant_.)


GEORGE SAND




FIN D'ALDO LE RIMEUR.
                
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